La Paz: sens dessus dessous (21/03 - 28/03)

Publié le par Machu y Picchu

La Paz: sens dessus dessous (21/03 - 28/03)

Ahanant de plateaux en cols, notre car n’en finit pas de grimper comme s’il cherchait à échapper à la gravité. La route s’élève vers la cité des nuages en traversant des étendues magnifiques. Alors que la nature indomptée, en Patagonie, nous a pris dans son giron pendant de longues semaines, voici désormais le monde sauvage relégué derrière une vitre, comme au zoo. En Bolivie, on s’est tracé un itinéraire de ville en ville. Celle que nous atteignons, six mois après avoir quitté Bruxelles, est aussi la troisième capitale de notre voyage et de loin la plus étrange.

Partie 1. En ville

La Paz: sens dessus dessous (21/03 - 28/03)

Dès les premières heures, l’impression d’étrangeté et de rudesse nous prend à la gorge... en même temps que les gaz d’échappement. Pas de renseignements ou d’indications à la gare routière, juste des mises en garde contre les vols et débrouille-toi. Longue marche par les rues, sans trop savoir où on va, à la recherche d'une auberge. On ne doit pas passer inaperçu à sept avec nos carapaces, fendant la brume dans le labyrinthe de rues pentues et pavées. Il est encore tôt, car en Bolivie, les bus n’aiment pas rouler sous le soleil et nous débarquons toujours aux petites; mais au bord des trottoirs, les cholas ont déjà installé leurs casseroles et leur vaisselle sous de grandes bâches bleues pour servir le bouillon aux travailleurs assis sur des tabourets, et ça fait des grands slurps sous les ampoules nues. Où est Edward Hopper quand on a besoin de lui?

Le sel du salar a à peine eu le temps de se décoller de notre peau et tout ce que nous avons vu de villes depuis plusieurs semaines, se résume à l’incongrue Potosí et à la douce Sucre. Des patelins de province en regard de la plus haute capitale du monde. Pourtant, avec son petit million d’habitants, La Paz n’a rien des mégalopoles modernes. Posée sens dessus-dessous au creux des montagnes, c’est une cité d’un autre temps où la mécanique semble l’emporter sur l’électronique, une sorte de village qui n'aurait jamais cessé de croître planté de quelques gratte-ciel.

La Paz: sens dessus dessous (21/03 - 28/03)
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On a toujours un peu de mal à se situer : c'est aussi difficile de se repérer dans la ville que de repérer la ville par rapport au reste du monde, dont elle semble coupée. Tout entière construite sur une cuvette comme sur les bords d’un saladier, elle est donc partout parabolique : où qu’on regarde, il y a toujours le sommet d’une autre montagne en face. La Paz occupe le dernier palier avant les hautes cimes. Le ciel qui la recouvre, strié d'un gigantesque mikado de lignes électriques, est celui de la haute montagne. Au petit matin elle est plongée dans une brume d'altitude, puis ses rues chaotiques dévoilent peu à peu leurs vues inattendues dans l'espace entre deux immeubles : une contreplongée sur les maisons pauvres des hauts quartiers, ou un pic enneigé, peut-être l’Illimani, le mont sacré qui la surveille de ses 5000m. Entre les hauts quartiers, les plus pauvres, et les bas, les plus riches, mille mètres de dénivelés défient les moteurs des vieux bus. Il parait qu'ils ont tendance à lâcher à mi-pente.

La Paz: sens dessus dessous (21/03 - 28/03)
La Paz: sens dessus dessous (21/03 - 28/03)

Nous? On avait envie d'un « break ». Poser nos sacs, glisser nos jambes sous la table et boire un bon café. Mais il n’y a pas de lieu plus épuisant que La Paz.

Toutes les formes de pollution sont réunies. Celle de l'air bien sûr, particulièrement insoutenable avec l'altitude, mais aussi la pollution sonore : les téléphones portables sont bloqués sur « volume maximum », les voitures klaxonnent minimum trois fois en arrivant à chaque carrefour, les bus sont équipés d'avertisseurs de trains, les vendeurs de rue brament, les moteurs feulent. Même en matière de pollution visuelle, on n’est pas en reste. Paysage saturé d'affiches, de pancartes en tout genre, par exemple, le mec qui donne des cours de rattrapage a agrafé des affichettes multicolores de 50cm aux poteaux électriques avec la photo d'un œil (ne nous demandez pas pourquoi).

Bref, on ne rencontre jamais une vue sobre ou ne serait-ce que cohérente. Apparemment, l’administration a pris conscience de ce problème et s'est lancée dans une chasse aux devantures illégales, qui se retrouvent le cas échéant placardées de l'indication "publicité non autorisée" sur fond rouge, ce qui n'arrange rien.

Le groupe finit par se disperser un peu. Alex se trouve une auberge « roots », comme elle dit, à la dure. Elle renoue avec ses sensations de voyageuse intrépide. Thomas, Adrien, Alizée se baguenaudent loin de la ville (oui, parfaitement, ils se baguenaudent, on a tous le droit de se baguenauder un peu de temps en temps). Seule Charlène loge à la même enseigne que nous, où il fait tout blanc, tout impersonnel, tout confort. Une fois n’est pas coutume, nous avons posé nos sacs dans les chambres d’une chaîne internationale. Une soirée pizza et Gone Girl enfoncera un peu plus le clou de la boîte d'où nous nous isolons des Boliviens. La nuit dans le bus et des heures à tourner dans la ville ont émoussé nos exigences et notre soif d'aventure.

Dans les rues bondées, la sollicitation est constante. "Achète-moi ce petit porte-clef lama. Tu ne veux pas le petit lama ? – Non madame je ne veux pas votre petit lama." … Quoique. Ce soir, nous revenons à l’auberge les bras pleins comme des petits Pères et Mères Noël, anticipant la tournée de cadeaux bruxelloise. Mais la fête est courte. Le temps de préparer à manger et le sachet rempli de cadeaux a disparu de son tabouret. Nous fermons les yeux sur cette première journée dans la capitale en nous disant que la seule chose que les Paceños n’ont pas volée, c’est leur réputation. Ambiance.

Le masque de la déception

Le masque de la déception

Alors dans ce bordel, on profite de ce qui nous avait tant manqué : enfin des cafés, des petits restos, et tant pis si c’est pour les touristes ! Et tant qu'à faire, autant jeter notre dévolu sur le resto tex-mex de la ville, tenu par un Flamand qui a imposé le maillot des diables rouges comme tenue de travail pour les employés belges (c.-à-d. lui-même), tandis que ses serveuses arborent les couleurs de l'équipe nationale mexicaine. On a pris un véritable abonnement chez ce pei qui dit alst u blieft en servant le chili con carne et qui nous offre des shots de tequila sous le regard bienveillant du onze de Marc Wilmots.

 

La Paz: sens dessus dessous (21/03 - 28/03)

C'est vrai qu'à La Paz, il y en a pour tous les goûts. Les vendeurs de rue ont un peu de tout, il y a même des disques d'Adamo en espagnol. Et, pour rendre la ville encore plus étrange, certains commerces sont organisés par quartier. C’est-à-dire qu’il y a une rue avec que des roues de moto, une autre avec que des pièces de moteur. Dans la rue des dentistes, les devantures arborent de très jolies photos de caries et d'appareils dentaires, accompagnées de lettres imprimées sur des feuilles A4 formant des mots comme "R A Y O N S     X" ou "P R O T H È S E S     D E N T A I R E S". Il y a même une rue pour les habits traditionnels de cholas, où on vend des longues jupes, des pulls en laine et des chapeaux (de loin, on dirait des petits "Palais des cotillons" de la rue du Lombard). Sans parler du quartier pour Israéliens, où tout est écrit en hébreu. On a bien dit "pour" Israéliens, ce n'est pas un quartier juif, pas de synagogue ou de bouffe kösher. Les mêmes produits qu'ailleurs, mais avec des écriteaux en hébreu.

Toujours dans la série incongru, un jour, un mec a eu l’idée d'organiser des rencontres de catcheuses en habits traditionnels, le "catch de cholas", et maintenant les foules affluent, rejointes par de plus en plus de touristes. Nous nous sommes laissé convaincre par une pub et nous voici maintenant à bord d’un petit bus aux fenêtres floquées d’idéogrammes chinois et de prières aux saints. Nous gravissons les rues tortueuses vers les banlieues populaires, tout là-haut. Arrivés dans le monde du dessus, les dernières hauteurs de la ville oubliées du reste du monde, nous reconnaissons dans la file, juste devant nous... Aya ! Notre amie japonaise quittée à Uyuni. Le monde (des touristes équipés du Lonely planet) est petit !

En plein après-midi, la salle de gym bondée fait penser à une kermesse d’école, sauf qu'un ring de boxe occupe laisse présager un spectacle de fin d'année un peu spécial. Des personnages étranges s’affrontent en duels mal chorégraphiés, tandis que dans les gradins, les visages burinés des locaux alternent avec ceux des touristes japonais ou américains. On ne sait pas très bien si les acteurs se font plaisir ou se sentent obligés, on ne sait pas très bien si on est bienvenus ou si on fait tache. Tout à la fois un peu absurde, un peu jovial, un peu navrant. De quoi se gratter le sommet du crâne en levant les sourcils.

La Paz: sens dessus dessous (21/03 - 28/03)
La Paz: sens dessus dessous (21/03 - 28/03)La Paz: sens dessus dessous (21/03 - 28/03)
La Paz: sens dessus dessous (21/03 - 28/03)

Bon, ça va cinq minutes, mais ça fait du bien quand ça s’arrête. Nous ressortons et traversons une sorte d’énorme marché du jeu de balle qui envahit trottoirs et asphalte. Un petit kilomètre de roche à la verticale nous sépare des plus hauts pics, éternellement enneigés. En contre-bas de la route, dans les pentes de la montagne, des sortes de favelas se perdent en une jungle de béton et de briques jusqu’au pied des sommets au loin. Et, juste au-dessus de nos têtes, pendus aux lampadaires, de sinistres mannequins se balancent au vent, en guise d'épouvantails contre les malfrats.

«Tout voleur pris sur le fait sera lynché et brûlé vif»«Tout voleur pris sur le fait sera lynché et brûlé vif»

«Tout voleur pris sur le fait sera lynché et brûlé vif»

Si c'était sensé nous rassurer, c'est raté. L’appareil photo ne verra pas la lumière du jour ici. Qu'est-ce qu'il aurait capturé? Des étals pas toujours faciles à distinguer des poubelles. Des blousons, des jupons, des chapeaux, mais en un peu plus sombre, plus poussiéreux qu'ailleurs. Des chiens errants qui font aussi leur marché. Et une gare de téléphérique ultramoderne. Une tache dans le décor. Nous pensons trouver un peu de calme dans les œufs suspendus, mais ici aussi nous sommes harcelés par le bruit. De retour dans les bas quartiers, nous retrouvons l’agitation et le tumulte des rues. Pas de repos dans cette ville.

Derrière un arrêt de bus, une vendeuse de chewing-gums surveille d’un œil son étal et de l’autre l’entrée des toilettes publiques. On lui achète un paquet de boules et elle nous rattrape au dernier moment, sûre qu’on a essayé de la rouler. Elle ne sait pas compter, mais elle n’ose pas faire confiance aux gens qui sautent dans le bus avec la monnaie. Dans ses yeux on peut lire de la panique. Sa vie, sur ce bout de trottoir, consiste à attendre et craindre le passage des clients.

Une vendeuse de cartes SIMUne vendeuse de cartes SIM
Une vendeuse de cartes SIM

Une vendeuse de cartes SIM

Vous sentez poindre le cafard? Nous aussi. Une petite excursion en montagne ne devrait pas nous faire de mal, pas vrai? Tu parles…

Partie 2. À la montagne

La Paz: sens dessus dessous (21/03 - 28/03)

Vous vous souvenez, dans l’Oreille cassée, Tintin réchappe d’une course poursuite en pleine jungle en feignant sa mort : il se jette hors de sa voiture et laisse celle-ci s’écraser au fond du gouffre. Eh bien, cette jungle, ce sont les yungas, et cette route, c’est la bien nommée ruta de la muerte. Hergé en avait entendu parler à une époque où elle était la seule à relier La Paz et Coroico. Sur cette bande de terre constamment arrosée par les pluies et les chutes d’eau, deux camions ne peuvent se croiser qu’à condition de laisser une roue au-dessus du précipice. Deux cent accidents par an. À côté de ça, le Salaire de la Peur, c’est Oui-Oui et sa p'tite voiture jaune et rouge au pays des jouets.

Depuis cette époque, une route alternative a été créée et celle qui reste l’une des voies les plus meurtrières de l’Histoire a été fermée... Mais c’était sans compter sur la soif de sensations fortes et l’appétit morbide des touristes. D’ailleurs, quand on a entendu parler de descentes à vélo sur la route la plus dangereuse du monde, notre sang n’a fait qu’un tour. Ou deux. Ou trois. Parce que, bon, c’est pas tous les jours qu'on lit sur Trip Advisor des avis négatifs pour cause de mort d’un participant.

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Bref, ce matin-là, quand la camionnette arrive en retard et à moitié pleine (« transport privé » mon cul), avant de s’offrir une pause d’une heure sur un parking poussiéreux, notre courage ne tient plus qu'à un fil. On (Alex, Charlène, Thomas, Machu y Picchu) se lance des regards inquiets. La banlieue et ses immondices garnis de chiens faméliques laisse enfin place à la grande nature des Andes ravagée de mille interventions humaines. Quelques centaines de mètres au-dessus de la capitale, c'est déjà la cumbre (le col, le signal) et la brume, la neige, le vent. Impossible de démarrer dans de telles conditions, il faut poursuivre et redescendre sous le quasi-blizzard. Vient enfin le moment d'enfiler combinaison, casque et gants, puis de se lancer sur la piste, lisse comme un billard. Un vélodrome à ciel ouvert, camions en plus. Alors c’est ça la fameuse route de la mort ? Peuh !
Mais le bus a tôt fait de nous récupérer: ce n’était qu’une mise en jambe. Quelques kilomètres plus bas, là où commence la véritable ruta de la muerte, la vallée qui s’ouvre devant nous semble impénétrable. Seul un serpent caillouteux bordé d’insondables à-pics s'enfonce dans la jungle, reliant le désert caillouteux de nos 4700m aux profondeurs humides des yungas 3400m plus bas, où les fleurs tropicales règnent en maître. Franchement, la topographie est suffisamment impressionnante en soi et la roue de Machu n’a vraiment pas besoin de sortir de son essieu à ce moment-là, mais bon, à partir du moment où elle était destinée à le faire, autant que ce soit avant les choses sérieuses. Il va nous entendre le mec qui nous a loué ces tacots !

À partir d'ici, les pédales ne nous servent plus à grand chose. Par contre nous confions notre vie à nos freins. La chute peut aller jusqu’à 800m et la plupart du temps, la route est en surplomb. À certains endroits, elle ne dépasse pas 3m de largeur. Ailleurs elle se change en ruisseau. D'autres portions sont en partie effondrées. Chaque fois qu’un peu d’audace nous monte à la tête et que nous prenons de la vitesse, une cascade en plein milieu du chemin ou un virage en tête d’épingle au-dessus du vide nous ramène à la raison.

La Paz: sens dessus dessous (21/03 - 28/03)
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Expérience ambiguë de proximité avec la mort. Ce qui fut autrefois un passage obligé et redouté pour des camionneurs est aujourd’hui un lieu de loisir... sans que la sécurité n’ait été améliorée d’un poil. Et tandis que les fesses rebondissent sur la selle et qu'on se cramponne au guidon, on se met à philosopher: prendre de la vitesse, c'est narguer tous ces morts ; s'accrocher aux freins, c’est être venu pour rien. Toile de fond: nature sauvage transformée en attraction de foire, prestataires cyniques, touristes irresponsables et t-shirts souvenirs... en un mot, le quotidien du backpacker en Bolivie.

Les étages de végétation se succèdent de manière spectaculaire. La pente finit par se calmer et nous touchons au but : Coroico, un bled rapidement transformé en lieu de villégiature et déjà sur le retour. Notre descente s’achève par un repas organisé dans un hôtel au luxe fané, en la compagnie bruyante d’une tablée d’Allemands et d’Américains reliés ombilicalement au buffet tiède. Nos jambes fatiguées sont bien contentes de trouver une piscine et n’ont pas d’yeux pour constater la couleur verdâtre de l’eau. Enfin, il suffit pour se requinquer d'une et une seule lampée d'alcool à 96°. La boisson des mineurs.

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Quelle drôle de journée ! Ce soir-là, dans la petite boutique du tour opérateur, le débat fait rage. En cause, la roue de Machu qui a tout de même foutu le camp quelques minutes avant la descente. Pas question que l'escroc en face de nous voie la couleur de nos billets au-delà des ares. Âpres discussions, qui se soldent sur des insultes à l’attention des gringos... Tout ça mérite bien une tequila chez le Flamand !

Partie 3. À la montagne, bis

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La cumbre et sa neige auront à peine le temps de nous manquer. À peine de retour en ville, nous préparons déjà une nouvelle ascension. Et devinez qui est de la partie... Alex, évidemment. Il faut abandonner la moitié du contenu des sacs aux bons soins des réceptionnistes, pour garder de quoi tenir trois jours en autonomie et par tous les temps. Évaluer les justes quantités de vivres, trier les vêtements, ce n’est pas un exercice facile.

Dans le vieux bus au pare-brise saturé de gris-gris, d'autocollants, de vieux flocages en chinois, de panneaux multicolores indiquant les destinations, le tout sous un large "Dieu est amour", les sièges défoncés et les petits chapeaux melon des cholas, posés de travers sur leurs cheveux tirés en longues tresses, balancent au rythme de la cahute.

C’est un peu de la Patagonie profonde qui nous revient en mémoire dans la cabane du guardaparque, où le registre des visiteurs attend notre signature. Le petit lac qui agrémente le paysage lunaire du col de la cumbre est plongé dans le brouillard. Un sobre panneau nous indique que nous faisons nos premiers pas sur la route del Choro. En voilà une qui porterait bien son nom si on était au Brésil, car en portugais «choro» signifie «sanglot»...

La marche commence péniblement. Notre première rando en autonomie depuis le Chili et les Torres del Paíne. Passée la première heure et l’euphorie du retour à la nature, la difficulté prend le dessus. Il fait froid, mais nous avons trop chaud sous nos couches car la pente est constante. Quelques dizaines de mètres devant nous, un couple de paysans coiffés de chapeaux et accompagnés d’une mule, disparaissent et réapparaissent dans la brume comme des fantômes, avant de s’éclipser définitivement derrière un virage.

La Paz: sens dessus dessous (21/03 - 28/03)
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Plus personne. Seuls à trois. Les cailloux roulent sous les bottines, le corps a mal, le silence s'installe. Cette première montée semble interminable. Personne n’ose avouer qu’il a entendu les échos d’une radio. Le son semble provenir de toutes les directions en même temps. Nous nous regardons: on n’a pas rêvé. La musique se rapproche, lentement mais sûrement, accompagnée d’un ronronnement. Sans doute une voiture, pas de quoi s’inquiéter, pourtant une sourde appréhension nous pousse à jeter les sacs en contre-bas de la route avant de les rejoindre nous même, juste à temps pour voir la jeep passer devant nous et s’éloigner. Qu'est-ce qui nous prend? Nous reprenons notre route, alourdis par un sentiment d’inhospitalité.

Le plateau qui fait office de point de départ «officiel» de la rando apparaît enfin. À partir d’ici, nous allons redescendre la montagne pendant deux jours, avec des paliers, des hauts et des bas. Devant nous, une barre de roche rend le chemin illisible, mais des Petits Poucets de mes fesses ont laissé une belle piste d’emballages de Snickers, donc on peut pas trop se tromper. Il faut jouer au chamois (bien que les chamois ne se trimballent pas dix kilos sur le dos), avant de trouver des marches. Des marches creusées dans la roche! Ce sont nos tous premiers pas sur le Qhapaq Ñan, le grand «Chemin de l’Inca». Plus qu’une route, c’est la colonne vertébrale d’un Empire, symbole de suprématie pendant plus d’un siècle. L’escalier que nous foulons doit avoir cinq cents ans, peut-être plus, puisque les incas se servaient largement des routes déjà ouvertes par les peuples soumis. Avoir intégré et exploité à leur avantage les cultures des peuples occupés, c’est paraît-il leur grande force.

La Paz: sens dessus dessous (21/03 - 28/03)
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Quelques ruines apparaissent, peut-être des maisons de bergers incas, au gré du brouillard. Dans cette ouate, on ne se rend compte de rien, et l’émotion est d’autant plus grande quand un coin de montagne ou un bout de précipice se laisse soudain découvrir. Il y a quelques semaines, dans une auberge de Patagonie chilienne, Machu lisait dans un magazine abandonné un article sur la psychologie des andinistes. La montagne était présentée comme un symbole phallique et la marche comme une expérience du corps, une conquête sexuelle. Ce qui fait dire à Machu que notre montagne à nous est plutôt une femme qui lève de temps en temps un pan de voile sur une vue vertigineuse ou un sommet majestueux. Mais selon Alex et Picchu, il n'y a pas de doute, c’est un chippendale.

Tout d’un coup la plaine apparaît. Un coin d’Écosse ou de Nouvelle-Zélande, mais avec des lamas à la place des moutons et des ruines à la place des trous de Hobbit.

Retenez bien cette leçon : "quand ta chaussure se met à bâiller au début d'une marche en autonomie de trois jours, c'est un mauvais augure"Retenez bien cette leçon : "quand ta chaussure se met à bâiller au début d'une marche en autonomie de trois jours, c'est un mauvais augure"
Retenez bien cette leçon : "quand ta chaussure se met à bâiller au début d'une marche en autonomie de trois jours, c'est un mauvais augure"Retenez bien cette leçon : "quand ta chaussure se met à bâiller au début d'une marche en autonomie de trois jours, c'est un mauvais augure"Retenez bien cette leçon : "quand ta chaussure se met à bâiller au début d'une marche en autonomie de trois jours, c'est un mauvais augure"
Retenez bien cette leçon : "quand ta chaussure se met à bâiller au début d'une marche en autonomie de trois jours, c'est un mauvais augure"Retenez bien cette leçon : "quand ta chaussure se met à bâiller au début d'une marche en autonomie de trois jours, c'est un mauvais augure"

Retenez bien cette leçon : "quand ta chaussure se met à bâiller au début d'une marche en autonomie de trois jours, c'est un mauvais augure"

Tout ça, c’est très beau, mais la vieille pierre, ça glisse, et la vieille pierre mouillée, ça glisse beaucoup. De plus, nous ne sommes pas des chamois (cf. plus haut). L’Inca ne le sait pas encore, mais il va en prendre plein la gueule pendant trois jours.

L'heure tourne, implacable, et nous avons du mal à tenir le rythme. Nous n’atteindrons jamais le premier village avant la nuit. La lumière est déjà basse, il faut se résoudre à planter la tente tant qu’on y voit. Le terrain est spongieux, en pente, il n’y a pas de bois pour se faire un feu, mais tant pis. Nous finissons par dénicher des copeaux de bois, de quoi faire un petit feu le temps d’avaler un repas frugal, juste au moment où le froid, l’humidité et la nuit nous tombent dessus. Moralité du jour: L’humidité mord et les cailloux font mal au cul.

Le matin est à peine plus rieur: p’tit déj’ écourté par la pluie qui se met à pleuvoir (c'est ce qu'elle fait de mieux). Machu traîne les pieds. Il nous faut encore une heure de marche pour atteindre le village où nous aurions du passer la nuit. Le temps s’est adouci, mais nous avons des kilomètres à rattraper. Pas facile de presser le pas sur la pierre et la boue glissantes. Passé le village, les gorges s’ouvrent sur une belle vallée où court un ruisseau. Une dame descend des champs dès qu’elle nous aperçoit pour nous accueillir dans sa petite échoppe (on se croirait dans Zelda) pour nous proposer du Coca et des Pringles à prix d’or. Manifestement, on n’est pas les premiers à passer par ici...

La Paz: sens dessus dessous (21/03 - 28/03)
La Paz: sens dessus dessous (21/03 - 28/03)La Paz: sens dessus dessous (21/03 - 28/03)

Bientôt, un autre village, avec une école toute pimpante. On se demande comment c’est possible. Les villageois, des êtres sans âge qui habitent des maisons sans adresse, vivent à deux jours de marche de la route la plus proche. Impossible de faire venir ne serait-ce qu’une moto. Le béton a-t-il été amené à dos de mules? L’école mise à part, le reste du village est un labyrinthe de parapets en pierre mousseuse à moitié plongés dans la brume. On s'attend à voir Sean Connery dans une robe de moine surgir de nulle part pour résoudre une énigme d’Umberto Eco.

Nous nous arrêtons pour reprendre des forces et demander notre chemin à un vieux monsieur édenté. Nous nous forçons à ne pas donner aux enfants les pièces ou les bonbons qu’ils nous réclament, car il paraît que la mendicité infantile est un fléau en Bolivie.

Une fois passé le village, le calvaire commence. La jungle. La vraie. Avec ses lianes, ses grottes, ses cascades, ses moustiques, son humidité, ses ponts suspendus et ses kilomètres de boue grouillante. «Promenade facile», «rando de débutants», qu’ils disaient! Pas avec cette flotte et ces pierres pleines de mousse, en tout cas! Les montées n’en finissent pas, n’en finissent pas... puis c’est la descente, il faut résister pour ne pas se laisser emporter par le poids du sac. Et cette conne de canopée qui fait comme un toit de serre. Il fait froid et chaud en même temps. Puis il faut traverser la rivière et évidemment les eaux sont en crue, on en a jusqu'à la cheville, on traverse en titubant contre le courant, et 'faut pas se rater sinon c’est le grand plongeon dans le vide. Quand tu crois que t’en es quitte, ça recommence, descente, rivière, montée, descente, rivière, montée. Et ce con d’Inca avec ses escaliers pleins de mousse.

La Paz: sens dessus dessous (21/03 - 28/03)
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Alors, oui, de temps en temps, quand la jungle et le brouillard veulent bien laisser entrevoir un bout de vallée, c'est beau, c'est même très beau. Mais le reste du temps, on ne peut s’empêcher de penser à un bon bain chaud ou un transat’ sur une plage.

Alex mène la marche. Pourtant, elle a pris un mauvais coup sur le pied et ça s’infecte. Picchu, de son côté, ne s’en sortirait pas trop mal si la semelle de sa chaussure n’avait pas décidé de foutre le camp. Infection et semelle qui se décolle: l’humidité ne nous épargne rien. Celui qui s’en sort le mieux, c'est Machu, et bien entendu c'est celui qui traîne la patte. Avec toutes les insultes proférées à l’adresse de l’Inca, il a dû se prendre une malédiction sur quatre génération.

La Paz: sens dessus dessous (21/03 - 28/03)
La Paz: sens dessus dessous (21/03 - 28/03)

Nous finissons par rejoindre le deuxième objectif plus tôt que prévu, cette fois. Il faut dire qu’on ne s’est pas beaucoup arrêtés en chemin pour profiter. Le campement n’a rien de joyeux, deux ou trois baraquements sombres sur une corniche, dans un virage, à la merci des intempéries. Pour nous, c’est surtout une table, des chaises et un terrain dégagé pour les tentes. L’ambiance semble atteindre des profondeurs inégalées de morosité, quand le propriétaire des lieux rajoute son grain de sel en nous refusant quelques bûchettes pour le feu et que des marcheurs rechignent à nous accorder un coin de leur table.

Ci-gît le bonheur de la marche en pleine nature
Ci-gît le bonheur de la marche en pleine natureCi-gît le bonheur de la marche en pleine nature
Ci-gît le bonheur de la marche en pleine nature

Ci-gît le bonheur de la marche en pleine nature

Heureusement, comme dit le proverbe, la bouffe réchauffe l’âme. Nous sommes rejoints par deux Allemandes sympathiques, parties à l’aventure avec un guide-porteur qui leur prépare la tambouille après avoir monté la tente. Nous devons faire un peu pitié. Le pied d’Alex n’est pas beau à voir, la chaussure de Picchu ressemble de plus en plus à une gueule de crocodile. Mais le plus navrant, c’est sans doute Machu qui ne peut plus cacher son désir de rentrer en hélicoptère.

Le lendemain, quand nous mettons la tête hors de la tente, Alex est déjà prête à lever le camp. Toujours bon pied bon œil. Enfin, "bon pied"...

Nous entrons péniblement dans la troisième et dernière journée de marche. Alex prend de l’avance, car elle a peur de nous ralentir avec sa blessure. Peut-être aussi qu’elle en a assez des gémissements de Machu et on la comprend. Quoi qu’il en soit, nous ne tardons pas à la rattraper.

Ensuite, ce sont les Allemandes et leur guide qui nous rejoignent. C'est alors que le sherpa, un petit trapu en maillot de foot et sandales, voyant l’état de la chaussure de Picchu, pose son grand sac et s’assoit sur le bord du chemin. Il sort de sa poche un poinçon et se change en cordonnier. Cinq minutes plus tard, la chaussure est plus solide que sa sœur jumelle!

La Paz: sens dessus dessous (21/03 - 28/03)

Avant de nous quitter, le guide a de bonnes nouvelles pour nous: nous touchons au but. Ragaillardis, nous entamons les derniers lacets dans la jungle. Ce n’est plus qu’une longue descente et il faut compter 23 virages avant d’atteindre la route. 22... 21... Nous courons vers l’idée d’une bonne douche. 10... 9... Voilà que Machu prend la tête! 2... 1... et soudain apparaissent les toits de taule et l’asphalte! C’est un hameau de maisons en parpaings, mais pour nous c’est Rome, c’est Paris, c’est Saint-Pétersbourg, le bloc de béton qui sert de terrasse c'est les jardins de Babylone, la bière presque fraîche, le nectar des dieux, et les latrines infectes où courent les poules, c’est la salle de bain de Louis XIV. Le plastique des chaises reçoit docilement nos culs avachis, nos jambes fatiguées se glissent doucement sous la table, et nos ventres affamés attendent impatiemment le sandwich à l’omelette de la victoire.

Allez on vous met encore quelques images avant de retrouver le "confort" de La Paz:

La Paz: sens dessus dessous (21/03 - 28/03)
La Paz: sens dessus dessous (21/03 - 28/03)La Paz: sens dessus dessous (21/03 - 28/03)
La Paz: sens dessus dessous (21/03 - 28/03)La Paz: sens dessus dessous (21/03 - 28/03)

Partie 4. De retour en ville

La Paz: sens dessus dessous (21/03 - 28/03)

Depuis l'intoxication de Machu (cf. Potosí), tout le monde s'est tapé la turista ou un dérivé. Pour une moitié du groupe, l'heure est maintenant aux punaises de lit. Qu'elle est rude la vie ici. Et encore, nous on ne fait que passer.

Une dernière nuit à La Paz et il nous faut déjà repartir. Check-out. Combien avons nous quitté d’hôtels, hostels, hostals, hospedajes, cabañas et autres alojamientos, chaque fois avec son ambiance, son esprit, ses voyageurs aperçus et oubliés? Et les sacs, toujours ces sacs qu'il faut organiser, réorganiser. Nos bouées, nos boulets. Notre confort, notre fardeau. Si on abandonnait notre confort, on abandonnerait notre fardeau. Et on sentirait le phoque.

À nous sept, avec nos mochilas, on remplit facilement un micro – un van qui assure le transport public en ville. Après avoir traversé les embouteillages, nous arrivons au « terminal » informel du Cimetière, où nous attend un petit bus. De grands panneaux de propagande vantent les efforts urbanistiques du gouvernement qui tente de relier les différents quartiers de la capitale tentaculaire. Tiens, à propos de propagande, le gouvernement bolivien dispose d’un « ministère de la communication », qui s’occupe de remplir des pages dans les magazines avec les progrès réalisés par la majorité…

La Paz: sens dessus dessous (21/03 - 28/03)
La Paz: sens dessus dessous (21/03 - 28/03)La Paz: sens dessus dessous (21/03 - 28/03)
La Paz: sens dessus dessous (21/03 - 28/03)

Ça sent la fin des aventures à La Paz, pas vrai? Eh bien détrompez-vous.

Le petit bus ne tarde pas à faire ronronner son moteur fatigué. Sortir de la capitale prend des plombes. À travers le fameux marché de l’Alto, d’où on se paie une vue incroyable sur la ville au creux des montagnes, la progression est très difficile. On se croit enfin tirés d’affaire, quand le bus marque un énième arrêt sur l’espèce d’autoroute qui traverse la banlieue. Soudain, des tambourinements sur la carrosserie et des cris nous obligent à nous arrêter. Par la fenêtre, on voit un type pris en sandwich entre notre bus et son van. Les passants crient des instructions confuses et notre chauffeur, qui ne comprend pas ce qui lui arrive, ne sait plus s’il doit avancer ou reculer. Le pauvre homme parvient finalement à se dégager. Plus de peur que de mal. Mais la situation dégénère. Une bonne trentaine de personnes s'ameutent autour du coupable descendu de sa cabine. Tout le monde gueule dans tous les sens. Assis dans une brouette orange, un enfant regarde tranquillement la scène.

De longues minutes passent, le bus reste immobile et le volant désert. Personne ne sait où est passé notre chauffeur. Au bout d’un gros quart d’heure, un passant monte à bord: "Ben qu'est-ce que vous faites? Votre chauffeur, il a été embarqué par les flics". Pourparlers dans notre groupe. On se décide à se séparer, les uns descendent pour essayer d’y voir plus clair tout en gardant un œil sur la soute à bagage, les autres restent à bord pour s’assurer que le bus ne parte pas sans les premiers. Au bord de l'autoroute, il y a des maisons, les gens vont et viennent, les vendeuses sont installées sur l’asphalte, et les deux premières bandes sont occupées par les bus et les vans à l’arrêt. Au guichet de la compagnie (oui, il y a un guichet au bord de l'autoroute, on n'est plus à ça près), on nous explique qu’on ne peut pas nous rembourser parce que les billets ont été achetés dans une billetterie du centre-ville, ce à quoi, nous, on répond qu’on s’en fout de l’argent, ce qu’on veut c’est continuer le voyage; seulement voilà, une demi-douzaine d’autres passagers se plaignent en même temps que nous, tout le monde essaie de gueuler plus fort que les autres, pendant que la compagnie continue à vendre des tickets pour le bus qui vient d’arriver et que les gens tendent leur billet pour essayer d’être les premiers. Le stress, c'est que l’heure tourne et bientôt plus aucun bus ne passera : nous sommes samedi 28/03/2015 et à minuit, tous les chauffeurs doivent être rentrés dans leur chaumière. Et pour cause, demain c'est dimanche d'élections. Couvre-feu. Interdiction de travailler. Et, au passage, interdiction de boire de l’alcool dans les 24h00 qui précèdent (si on vous a servi de l’alcool aujourd’hui, le proprio du bar encoure, parait-il, une amende équivalent à 1000$US, soit 7 fois le salaire minimum…).

Revenons à nos moutons. Le guichetier évasif laisse entendre qu’un bus arrive pour nous emmener. Impossible d’avoir plus d’infos. Quand on demande si le bus va arriver plein, on nous répond : « oui, oui », alors on dit : « mais comment on va faire pour tous monter ? » et on nous dit : « c’est un gros bus », ce qui ressemble à une mauvaise blague. Finalement, le bus qui déboule est vide. On transfert les bagages, on monte, prêts à démarrer sans tarder, limite impatients, oserais-je dire. Mais non. Surplace. Pourquoi ? Parce qu’une partie des passagers lésés n’ayant pas eu la patience d’attendre, ils se sont taillés par leurs propres moyens, si bien que quelques places restent vacantes à bord du bus de remplacement. Plutôt que de tout simplement s’arracher, la compagnie tient à vendre les places libres ! Le comble, c’est qu’elle vendra trop de tickets, de sorte que trois passagers se retrouveront assis dans l’allée centrale.

Avec tout ça, c’est l’heure de pointe. Un kilomètre plus loin, on se trouve littéralement à l’arrêt au milieu d’un bordel indescriptible de fumées de pots d’échappement, de coups de klaxons, de mini-vans aux toits encombrés de valises, de touks-touks tunés, de chauffeurs qui font la circulation depuis leur cabine, de livreurs à vélo, d'ouvrier, de cholas portant des sacs de ciment qui traversent n’importe où, de poulets, d’enfants, de vendeurs de rue, de camions en panne et de pneus.

Quand enfin on s’extirpe de ce bourbier, d’autres aventures nous attendent : le bus doit traverser une rivière à gué, en pleine ville, pour contourner la circulation. Il tente des dépassements complètement débiles dans des virages alors que la nuit est déjà tombée – nous offrant au passage un coucher de soleil inoubliable sur les Andes.

Peut-être, si les astres n'en décident pas autrement, finirons-nous par atteindre Copacabana et le lac Titicaca...

Sacré inca, va !

Sacré inca, va !

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M
J'y étais,j'ai senti les odeurs,entendu les bruits,vu les ombres,touché la pierre humide et tremblé sur la route de la mort....waouh!!!!!!!!!
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